silverculteur a écrit:
Prêter assistance à une personne inconnue en danger n'est pas une notion présente dans la loi, ni dans la culture chinoise.
On peut aussi produire des arguments en sens contraire. Une des questions classiques pour obtenir le permis de conduire chinois est de savoir quoi faire si on éventre quelqu'un lors d'un accident de la route. La bonne réponse est de remettre les viscères en place et de fournir une planche (que chacun est invité à avoir en permanence dans sa voiture pour ce genre de cas), ou un saladier ou autre objet du genre, pour que le blessé puisse contenir ses viscères en se le plaquant sur le ventre. Je ne crois pas que ce soit une obligation, une norme contraignante, mais c'est au moins une tentative culturelle d'introduire d'autres comportements que tourner une vidéo et fuir en ayant achevé le blessé.
silverculteur a écrit:
La Chine des campagnes doit être différente de la Chine citadine
Oui mais cela peut être parfois dans le bon sens. On m'a bien plus foutu la paix dans les petites agglomérations au milieu des rizières que dans les villes de millions d'habitants.
silverculteur a écrit:
La Chine des campagnes doit être différente de la Chine citadine et encore pire en terme de morts sur les routes
Pas sûr du tout ! Et il se trouve que j'y ai été confronté par un de mes proches.
D'abord il est impossible de généraliser "la Chine des campagnes". Le Jiangsu est plat comme un discours de Macron, mais plus du tiers du territoire chinois (ouest) c'est de la haute montagne, du désert, et du désert de haute montagne, la Mongolie c'est du désert, le Dongbei c'est de la forêt épaisse avec des tigres (et des garde-frontières nord-coréens et un pourcentage inimaginable d'espions).
Dans tout l'est de la Chine, c'est-à-dire les zones agricoles les plus actives hors Sichuan, les routes de campagne ne sont souvent pas goudronnées (déjà à vingt kilomètres de Shanghaï) et peu de gens ont des voitures. On se déplace soit à bicyclette, soit dans des petits véhicules-taxis qui ressemblent à des mobylettes dans un œuf Kinder. Ca ne va jamais vite, la route est souvent une piste de poussière qui fait approximativement deux fois une voie mais sans marquage au sol, si on tombe on tombe en général dans un petit fossé : ça ne fait pas du bien mais il y a pire. Comme il n'y a jamais beaucoup de circulation mais toujours un peu et que tout le monde se connaît, on peut être pris en charge assez vite.
En ville, les voitures ne s'arrêtent jamais, mais elles vont rarement vite. Il ne sert à rien d'attendre que le petit bonhomme soit vert : il faut regarder les véhicules qui arrivent et chercher à entrer en communication mentale avec eux pour calculer "la courbe que décrit un chien en courant après son maître", comme disait Lautréamont, et tenter de ne pas se trouver à ce qui devrait être le point de rencontre. Parfois la voiture passera devant toi, parfois elle passera dans ton dos, parfois il vaut mieux que tu avances à rythme constant, parfois il vaut mieux que tu t'arrêtes et regardes le conducteur : ça dépend.
Quand ça ne fonctionne pas, tu es mort, en effet. Mais ça reste bien moins dangereux qu'habiter à Saint-Rémy-lès-Chevreuse, où quotidiennement, des provinciaux en tort et en automobile traversent l'agglomération à fond la caisse, l'aile de leur véhicule à 5 centimètres de la tête de ton gosse de trois ans que tu as juste le temps de tirer vers toi, et freinent plus loin pour te faire des bras d'honneur au motif que "les gens n'ont qu'à pas marcher sur les trottoirs".