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La baisse des prix de l’immobilier sera durable d’après les notaires
27 octobre 2014
Derrière des statistiques générales qui font toujours état de très faibles variations des prix de l’immobilier à la baisse depuis près de 3 ans, le discours des notaires a nettement évolué. Ces légères diminutions des prix n’ont rien d’inquiétantes et pourtant le discours se veut alarmiste. Tentons de décoder ces messages contradictoires et de faire le point sur l’évolution du marché immobilier en France.
Dans les chiffres, tout va bien ou presque
La dernière note de conjoncture des notaires sur le marché immobilier en France a été publiée. Elle confirme les dernières statistiques de l’indice Notaires-INSEE sur les prix de l’immobilier. Globalement les prix des maisons et des appartements continuent de diminuer légèrement sur un an avec une tendance plus forte en Ile-de-France en Province (-1.2 % pour les maisons, -1.3 % pour les appartements).
Concernant les chiffres sur les volumes, on y apprend qu’il y a eu 735 000 ventes de logements anciens entre juillet 2013 et juin 2014. Cela correspond à une hausse de 9 % sur un an, mais les 12 mois précédents avaient été très mauvais pour les volumes. On reste donc sur des niveaux bas de transactions immobilières et cela malgré les anticipations d’achat avant la hausse des frais de notaires étalée sur le 1er semestre 2014 en fonction des départements.
En ne regardant que les chiffres bruts, on pourrait presque penser que la situation s’améliore et qu’il n’y a aucune raison de s’inquiéter. Les transactions sont un peu plus fréquentes, les prix baissent un peu moins, etc. Et pourtant, les signaux de l’analyse des notaires sont très contradictoires avec cela.
Que cachent ces chiffres sur l’évolution des prix ?
Pour commencer, les notaires tentent de justifier les écarts de plus en plus troublants entre leurs chiffres et tous les constats sur le terrain. En effet, depuis plusieurs trimestres, tous les témoignages locaux font état de réduction des prix bien plus conséquentes que cela. Il ne se passe pas une semaine sans qu’une interview d’un professionnel local fasse l’état d’une baisse de 5 à 10 % des prix cette année sur son secteur, parfois dans la même tendance que les années précédentes. Et pourtant dans les chiffres des notaires, les prix n’ont baissé que de 4.4 % en près de 3 ans (de 7.5 % en tenant compte de l’inflation).
Les notaires expliquent ceci : "Les contrastes locaux sont forts, selon la localisation et le type de marché (résidence principale, secondaire ou investissement locatif). Cela peut parfois provoquer un décalage entre les résultats statistiques et le sentiment des acteurs locaux, car les marchés peu actifs sont faiblement représentés dans les résultats agrégés, surtout si les prix y sont bas. "
Il faut en effet rappeler, quand plus des effets de structure lors d’un retournement du marché, il faut faire avec la non-prise en compte de certains secteurs, notamment ceux où les prix baissent le plus, car il n’y a pas assez de transactions dans ces secteurs... Autrement dit, la plupart des secteurs ruraux où les prix chutent réellement sortent des statistiques. Et seuls les biens des grandes agglomérations, là où le prix du mètre carré est le plus élevé, restent pour donner les moyennes actuelles.
On peut donc naturellement se demander à quoi ça sert de publier des données sur un échantillon de transactions qui n’est pas représentatif de la même chose d’une période à une autre. Nous avons bien vu avec notre exemple de baisse masquée des prix comment une baisse générale des prix de 5 % pouvait donner dans les publications une augmentation de la moyenne des prix par un simple changement de la répartition du type de biens.
Les prix baissent peu mais beaucoup de vendeurs doivent s’attendre à faire une moins-value
Autre fait troublant dans cette nouvelle note de conjoncture immobilière, les notaires précisent dans leurs perspectives que : "Tous biens confondus, les notaires constatent d’ores et déjà que des vendeurs doivent consentir des réductions importantes s’ils veulent vendre dans des délais rapides. Ainsi, bon nombre des vendeurs ayant acquis entre 2005 et 2011, ne retrouvent pas, à la revente, leur prix d’acquisition originel.".
S’il apparaît comme normal que les acheteurs de 2011, voire de 2010 doivent consentir à encaisser une moins-value pour vendre en 2014 après près de 3 ans de baisse des prix. Pourquoi avertir que cela concerne tous les acheteurs depuis 2005 à 2011 si la diminution des prix est si faible que ne le laisse croire les données moyennes ?
On voit là que derrière des chiffres qui trimestre après trimestre ne laissent pas transparaître de véritable correction, les notaires préparent les vendeurs à devoir encaisser des moins-values s’ils veulent vendre dans les mois et années à venir. Finalement, on est peut-être pas si loin de la vérité quand on vous dit que les prix sont déjà revenus à un niveau équivalent, voire inférieur à ceux de 2005.
Ces propriétaires pourront tenter de limiter les pertes en renégociant leur crédit immobilier pour profiter des taux extrêmement bas qui accompagne cette lente érosion des prix et donc de la valeur de leur maison ou de leur appartement.
De -30 à -40 % en l’espace de 10 ans ?
En 2008, Immobilier-danger.com a été créé en grande partie dans le but d’informer sur les risques liés à l’achat d’un bien immobilier en bulle. Tout message mettant en garde contre des risques importants d’une baisse des prix prolongée, et donc d’une ampleur importante sur la durée, était moqué par la plupart des professionnels. Les prix ne pouvaient pas baisser. Impossible ! Le marché était très sain, il n’y avait aucune spéculation des particuliers, il manquait plus d’un million de logements, etc. Tous les prétextes étaient bons pour dénigrer toute analyse différente de la situation.
Aujourd’hui, en 2014, c’est Maître Delessale, de la Chambre des notaires de Paris/Ile-de-France (président de la commission des statistiques) qui affirme qu’après près de 3 ans de baisse, cette tendance va se poursuivre et que cela peut se traduire par une baisse cumulée des prix de l’ordre de -30 à -40 % en 10 ans en tenant compte de l’inflation. Vous pouvez retrouver son interview datant de juin 2014 dans cette vidéo.
Tout le monde s’accorde désormais donc pour dire que la tendance baissière est durable et que c’était prévisible étant donné les hausses de prix observées entre 1998 et 2008...
Quand la peur change de camp
Hier, les acquéreurs se précipitaient vers le 1er bien immobilier qui correspondait à leur budget, sans négocier ou presque, de peur qu’un autre acquéreur ne l’achète avant et qu’ils soient obligés de se rabattre sur un logement moins bien faute de prix qui n’arrêtent pas d’augmenter. Les vendeurs avaient toutes les cartes en main pour vendre au prix fort et pour se montrer intransigeant sur le prix.
Désormais, après plusieurs années de diminution des prix et une prise de conscience qui se généralise que cela est partie pour durer. Les mentalités changent radicalement. Comme le rappelle les notaires, les acheteurs sont de plus en plus vigilants (notamment sur les frais liés à l’achat, aux charges de copropriétés parfois exorbitantes ou encore aux résultats du DPE) et refusent d’acheter au moindre doute. À quoi bon se précipiter quand il est fort probable que demain ils trouveront mieux pour le même budget au fur et à mesure que les prix baissent.
Les vendeurs les plus pragmatiques, eux, se rendent compte que plus ils tardent à adapter leur prix de vente à la réalité du marché et plus ils perdront de l’argent. Dans un marché baissier, attendre pour vendre est un pari plus que risqué. Plus que jamais le temps joue pour l’acheteur et est l’ennemi du vendeur.
Dans ce contexte, difficile de prédire si la baisse des prix va se poursuivre à un rythme modéré et qu’il faudra encore plusieurs années pour que les prix redeviennent abordables par rapport aux revenus ou si celle-ci va s’accélérer au fur-et-à-mesure que ces informations se diffuseront et que les comportements s’y adapteront.
http://www.immobilier-danger.com/La-bai ... r-778.html