Le paon et le palais.
Un jeune paon, imbu de son plumage Fût pris dès son plus jeune âge En mains par une vieille pintade Qui laissa son vieux coq en rade.
Lors, notre jeune volatile Qui se trouvait fort volubile Ne fût plus satisfait de son habitat Et se rêva en costume d’apparat.
Pourquoi, se disait-il, se contenter D’un simple poulailler, fût-il doré, Alors que, sans travailler, Je puis demeurer au palais.
Il me suffit, si mes calculs sont bons, De prendre mes congénères pour des pigeons Et, pour les prochaines élections, De bien jouer les trublions.
Ainsi fût fait, et contre toute attente, Il prît la place laissée vacante Par tous les vieux coqs déplumés Dont tout le monde s’était lassé.
Pour constituer sa basse-cour Il fit appel à des vautours Aptes à tondre la laine, A amasser toutes les graines.
Ses anciens congénères Qu’il jugeait fort vulgaires Virent enfin, mais un peu tard, Qu’on les prenait pour des bâtards.
Fort de son plébiscite aux élections, Notre dieu-paon, tel Pygmalion, Favorisa un jeune sardouk Dont il se servait comme bouc.
Grisé par ses nouvelles prérogatives, Celui-ci, de manière fort hâtive, Se crût par son maître autorisé De jeunes oisons brutaliser.
Las, malgré la volonté manifeste De celer ces faits funestes, L’histoire vînt à transpirer Hors de murs du Palais.
Devant ce gros scandale, Notre apprenti Sardanapale Dût rétropédaler A son grand regret.
Il envoya ses janissaires Désigner un bouc émissaire Mais la sauce ne prît pas Et l’oisillon resta sans voix.
Moralité : Même les rois de l’enfumage, Ceux mêmes qui se voulaient rois mages, Tombent un jour de leur piédestal Et devront quitter leur habit royal.
Fable de Jean De La Fontaine (1621-1695) revisitée par un auteur inconnu que l'on félicite au passage pour son talent et le régal de cette lecture d'actualité .
_________________ « Si la connaissance crée parfois des problèmes, ce n'est pas l'ignorance qui permet de les résoudre. » (Isaac Asimov)
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